BRUXELLES (MPE-Média) – L’exposé du plan d’action de l’Union européenne en soutien à l’industrie de l’acier par M. Antonio Tajani, Vice-président de la Commission en charge de l’industrie, prévu ce jeudi matin à Bruxelles durant le « Steel Day » d’Eurofer, l’association européenne des producteurs d’acier, s’est finalement réduit à l’énoncé par ce dernier de quelques bonnes intentions. Extraits et propos.

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M. Antonio Tajani face aux invités d’Eurofer, à Bruxelles (ph CJ MPE-Média)

« Nous devons travailler ensemble, Unions syndicales, Compagnies, Gouvernements, nous avons besoin d’une nouvelle révolution industrielle en Europe », a déclaré M. Antonio Tajani, n°2 de la Commission européenne et premier de cordée pour l’industrie et les matières premières dites stratégiques, après avoir expliqué que « l’industrie de l’acier a besoin d’une nouvelle direction, d’une nouvelle stratégie, d’une nouvelle R&D et de conquérir de nouveaux marchés ».

 

M. Tajani a toutefois bien confirmé que la Commission travaille sur une « nouvelle approche pour l’acier et pour l’aluminium », ajoutant qu’une « avancée avait déjà eu lieu pour l’aluminium » - faisant référence à l’accord passé l’an dernier et en 2013 par la Commission avec les grands producteurs d’aluminium, accord obtenu de haute lutte par l’Association européenne de l’aluminium, qui permettra peut-être tout juste d’enrayer l’hémorragie et de conserver quelques unités de production en Europe.

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MM. Wolgfang Eder, Pdt d'Eurofer, PDG de voestalpine, producteur d'acier autrichien et Gordon Moffat, Directeur général d'Eurofer (ph CJ MPE-Média)

Mais rien de concret n’est encore fait ni acté pour l’acier, ce qui n’a pas surpris le Président d’Eurofer M. Wolfgang Eder, qui s’attend à « encore au moins deux ans de discussion avant de pouvoir déboucher sur quelque chose ».

M. Eder maintient haut et fort la volonté d’Eurofer « de défendre le libre échange, de dire non au protectionnisme et aux barrières douanières dont l’impact est toujours réducteur à terme pour l’ensemble des marchés. C’est du très court terme, et il faut des années pour s’en débarrasser.»

« Ce qu’il faut voir, c’est qu’il y a un mouvement de l’Union vers des efforts, et que M. Tajani nous a redit ce matin qu’ils ont besoin de ce forum, que le dialogue continue entre la Commission, les Unions syndicales et les Compagnies. Nous n’en sommes qu’au début d’une longue discussion», a ajouté le Président d’Eurofer lors de la conférence de presse qui a suivi.

 

Des « mesures » annoncées courant juin

« Nous allons annoncer des mesures pour les secteurs de l’automobile et de la construction, vraisemblablement durant la 2e semaine de juin. Nous devons réduire le coût de l’énergie entre l’Europe et ses compétiteurs », a précisé M. Tajani, ajoutant qu’il fallait « faire monter au niveau supérieur les capacités d’innovation et de progrès technologiques ».

 

Personne ne s’attendait à avoir droit à l’exclusivité d’une annonce de la Commission européenne, mais au moins à plus de clarté dans l’énoncé des « trois directions vers lesquelles iront ces mesures : meilleures pratiques, meilleure compréhension des marchés de l’acier, enfin, il faut mieux orienter ces industries », a déclaré Antonio Tajani, bien plus virulent lorsqu’il parlait en face des délégués syndicaux européens à la fin de l’hiver dernier, peu après les annonces des fermetures chez ArcelorMittal à Liège et à Florange, clamant qu’il était « hors de question de voir la désindustrialisation de l’Europe se poursuivre et la compétitivité se réduire à une peau de chagrin », sans compter l’effet désastreux en terme de chômage.

 

« Le soutien à l’emploi est crucial », a dit M. Tajani

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Une manifestation visant ArcelorMittal attendait les participants à leur arrivée au Steel Day d’Eurofer (ph CJ MPE-Média)

« Vous pensez que cela suffira ? », a osé demander à M. Tajani la modératrice Tanya Beckett, tentant de piquer le Commisaire européen au vif : « le soutien à l’emploi est crucial. Un engagement fort de l’UE est possible en ce sens. Il est aussi possible de travailler plus sur les ETS » – le paquet contre les émissions de gaz à effet de serre, l’un des vrais sujets du moment – a concédé M. Tajani avant de noter qu’il fallait « aussi investir dans la formation des personnels », sous les yeux un rien dubitatifs de M. Bart Samyn, le Secrétaire général adjoint d’Industri’All, l’Union mondiale des syndicats de l’Industrie, associé à cette table ronde.

Arrivé en retard, le Vice-Président de la Commission n’est pas resté comme prévu à la table ronde qui suivait, où un autre Commissaire européen, M. Laszlo Andor, en charge de l’emploi et des affaires sociales, l’a remplacé de facto après avoir lui aussi tenté de donner quelques gages de bonne foi aux aciéristes et aux représentants des salariés présents.

Il fallait s’y attendre, mais l’espoir fait vivre. Les 500 participants à la « conférence de haut niveau » d’Eurofer intitulée « sécuriser le futur de l’industrie de l’acier européenne » semblaient tellement pantois face à un pareil vide qu’aucun d’entre eux n’a osé poser de question lorsque la journaliste Tanya Beckett le leur a proposé.

 

Un risque de "perte en capital humain"

Le Commissaire européen en charge de l’emploi et des Affaires sociales M. Laszlo M. Andor, économiste de métier, a pris le relais en pointant « le risque de perte en capital humain, aujourd’hui, il nous faut trouver comment préserver les capacités de production en Europe ». Ce sur quoi tout le monde s’entend : « 20 millions de tonnes de capacités ont été fermées récemment dans l’Union européenne. Nous voulons le maintien des capacités mais aussi des emplois qui vont avec », a renchéri M. Bart Samyn (Industri’All).

 

En fin de compte, les moins déçus ont été une fois de plus les premiers concernés, les aciéristes, venus de toute l’Europe comme le PDG de Tata Steel Europe M. Karl Ulrich Köhler, intervenant durant la table ronde suivante consacrée à « la feuille de route vers une Europe bas carbone 2050 ».

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Une 2e table ronde traitait de la question "climatique" et du prix de l'énergie pour les producteurs d'acier (ph CJ MPE-Média)

« Je m’inquiète pour l’industrie européenne de l’acier qui n(a pas encore récupéré de la crise de 2008 alors qu’ailleurs dans le monde, tous les autres pays ont récupéré », a déclaré M. Köhler, dont la partie européenne du groupe indien Tata a fait l’objet de rumeurs non fondées de revente, nous confirme le porte-parole de la Compagnie M. Bob Jones.

« Laissons les choses filer, soit. Mais du côté des investisseurs, qui va vouloir mettre de l’argent dans une industrie qui génère aussi peu de profitabilité ? Oui, je demeure très inquiet. Qui va investir dans tous ces secteurs marqués au rouge ? Nous avons besoin d’approches sectorielles et d’objectifs climatiques raisonnables, d’autant que nous pesons près de 2 millions d’emplois en Europe », a poursuivi la PDG de Tata Steel Europe, qui estime « urgent d’inviter les autres régions du monde à travailler aussi sur la réduction du CO2, car c’est une question globale ».

 

Diplomatique

Diplomatique en diable, le Directeur Général d’Eurofer M. Gordon Moffat avait ouvert les débats en notant que « de nouvelles opportunités s’ouvrent pour un dialogue plus constructif des aciéristes avec l’Union européenne ».

M. Moffat ira droit au fait en conférence de presse, une fois les élus partis : « nous payons le gaz cinq fois plus cher, l’électricité deux à trois fois plus cher qu’aux Etats-Unis ou ailleurs dans le monde, ce qui est principalement dû aux politiques climatiques de l’Union. C’est tout simplement insupportable pour nos marges ».

 

Christophe Journet

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Voir aussi sur :

www.eurofer.org

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Mis à jour (Vendredi, 14 Juin 2013 16:38)