LUXEMBOURG (MPE-Média) – Le groupe APERAM – « an Aperture for ArcelorMittal », l’ex filiale de production d’acier inoxydable du géant mondial de l’acier devenu société autonome cotée en bourse en janvier 2011 – annonce à son tour être passé aux primes d’alliages quotidiennes le 1er janvier 2014, comme son concurrent et nouveau leader de secteur finlandais Outokumpu. Explications détaillées.

« Comme annoncé en novembre 2013, Aperam a commencé le 1er janvier dernier à accepter des commandes de ses clients européens sur la base d’une prime d’extra-alliages définie au jour le jour », explique le porte-parole de l’ex leader mondial de production d’acier inoxydable devenu challenger d’Outokumpu depuis que les régulateurs de l’Union européenne ont accepté sa fusion avec l’allemand Inoxum, ex filiale productrice d’acier inoxydable du consortium allemand ThyssenKrupp.

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Minerais de nickel (source INSG)

« La gestion courante des commandes passées selon ce nouveau mode via notre système informatique est actuellement en phase de réglage », précise Aperam, qui ne commente pas davantage ce changement de mode de fixation des extra d’alliages.

Le producteur finlandais Outokumpu a annoncé la semaine dernière avoir procédé à la même modification de son mode de calcul et d’offre des primes d’alliages appliquées à la vente d’acier inoxydable en fonction de leur teneur en nickel et en d’autres intrants des aciers résistants à la corrosion, primes généralement indexées sur les variations du cours du nickel au London Metal Exchange et jusqu’ici mensuelles.

 

L’explication d’Outokumpu

« La nouvelle prime d’alliage est fondée sur la composition chimique particulière de chaque référence d’acier inoxydable. Les matières d’alliages les plus importantes sont le nickel, le chrome, le molybdène et le fer. Il peut y avoir aussi d’autres métaux pour certains aciers spéciaux », nous explique la porte-parole du producteur finlandais en réponse à nos questions.

« La base de calcul reste la même que celle du précédent mode de calcul des primes d’alliages mensuelles et, comme expliqué en premier, est fondée sur la composition chimique particulière de chaque référence ou famille d’acier inoxydable et sur les dernières cotations marché des matières premières utilisées – par exemple les cotations du nickel au LME. Nous publions les surcharges d’alliage dans nos pages web et également la prime au jour le jour depuis janvier 2014 », poursuit la même source.

« Plusieurs facteurs peuvent bien sûr impacter la prime d’alliage, tels que la valeur des monnaies, des autres métaux, etc. Nous ne pouvons malheureusement pas en dire plus sur le mode de calcul lui-même compte tenu du caractère concurrentiel de ce type d’opérations », conclut la porte-parole d’Outokumpu.

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(Source Laplace-Conseil/AMRAE)

Ces primes d’alliages ou « d’extra-alliages » concernent à la fois les acheteurs des centres de service distributeurs de métaux et les grands clients des producteurs d’acier inoxydable passant leurs ordres d’achat à la tonne. Elles sont généralement confondues avec le prix d’achat du métal lui-même maisi leur montant est présenté séparement par le producteur vendeur.

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Les cours du cuivre, de l'aluminium, du nickel et de l'or au LME (Source Laplace-Conseil, LME, MB)

 

Tendance baissière dans la période

L’impact des primes d’alliages peut être important, comme ce fut le cas en 2007 lorsque le nickel avait atteint un point haut à près de 70.000 dollars la tonne contre environ 13.730 dollars/tonne vendeur cash le mois dernier au LME où la tendance était plutôt baissière, ce qui n’est pas sans poser de problème aux producteurs d’acier inoxydable qui doivent en principe diminuer le montant de leurs primes d’alliages en proportion de cette valeur.

La demande mondiale en nickel a continué à progresser en 2013 comparé à 2012, en particulier en Chine, où les producteurs ont tendance à contourner l’obstacle du prix du nickel en ayant recours à une forme qualitativement moins élevée du métal, le « nickel pig iron », moins résistant à la corrosion lorsqu’il est utilisé pour produire de l’acier inoxydable.

 

Production et usage mondiaux du nickel, source INSG

L’INSG estime que la production mondiale de nickel primaire qui s’élevait à 1,61 Mt en 2011 et à 1,76 Mt en 2012 pourrait avoir atteint 1,91 Mt en 2013 et continuer à croître jusqu’à 1,97 Mt en 2014, en fonction du volume de nickel pig iron utilisé par les producteurs chinois en lieu et place de nickel pour produire de l’acier inoxydable.

La consommation mondiale de nickel est passée de 1,58 million de tonnes (Mt) en 2011 à 1,66 Mt en 2012 et pourrait approcher 1,77 Mt en 2013, jusqu’à 1,85 Mt en 2014, a annoncé en octobre 2013 l’International Nickel Study Group (INSG) réuni au Portugal. Soit une hausse de près de 4,5% pour l’année qui commence.

« 2012 a été une année de restockage et la poursuite de la constitution de stocks a continué en 2013 et devrait continuer en 2014 », expliquent les experts de l’INSG, qui précisent que les raisons de cette hausse des stocks incluent le nombre de nouveaux projets nickelifères devant être lancés, les projets existants dont la production a augmenté en 2013 – incluant la production de nickel pig iron en Chine – et des évolutions de volumes décevantes en dehors de la Chine et de l’Inde.

« En 2012, le marché mondial du nickel a été excédentaire de 94.500 tonnes d’après l’INSG. Sur les neuf premiers mois de 2013, l’excédent a augmenté encore à 127.100 tonnes », souligne Philippe Chalmin, titulaire de la chaire d’Histoire des matières premières à Paris Dauphine et président fondateur du Cercle Cyclope dans son éditorial de décembre 2013.

 

Les banques et les métaux non ferreux

Le récent retrait du négoce de commodités non ferreuses annoncé par plusieurs grandes banques globalisées tirant les leçons des excés de leurs pratiques récentes en matière de couverture du risque achat devrait également impacter le marché du nickel en libérant des flux physiques sur le marché global, comme c’est déjà le cas pour l’aluminium dont le prix au LME est toujours relativement bas.

« Ceux qui se plaignent du rôle des banques devraient aussi voir où se situeraient les prix globaux si les banques ne s’étaient pas engagées dans le financement des stocks de métaux », déclarait en octobre dernier Chris Evans, le directeur du développement du London Metal Exchange lors du congrès de l’INSG. « Je pense avant tout que lorsque les gens se plaignent de la volatilité des prix ce qu’ils veulent dire est prix élevés. Mais élevés est un mot déplacé. Qui dit que les prix sont élevés ? Pour un consommateur en Europe, sans doute. Mais pour une mine en Amérique du sud ou en Afrique, un prix élevé n’est pas du tout une mauvaise chose », ajoute Chris Evans.

 

Christophe Journet


Voir aussi sur :

www.aperam.com

www.outokumpu.com

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