DEAUVILLE (MPE-Média) – Le devenir de la transition énergétique et des nouvelles règles du jeu de l’offre et de la demande entre énergies classiques et renouvelables, tels sont les thèmes qui étaient au centre du colloque Enerpresse 2015 à Deauville des 25 et 26 juin. Un bel écheveau de considérations technologiques, juridiques et de marché à démêler en présence d’une pléïade d’experts et de dirigeants publics et privés de l’énergie, entre qui existent encore quelques sujets d’incompréhension et de larges espaces de convergence à parcourir. Détails.

A en croire Virginie Schwarz, directrice de l’énergie à la direction générale de l’énergie et du climat au ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie (MEDDE), toutes les questions techniques, juridiques, de capacités que posent actuellement la transition énergétique devraient se régler dans de meilleurs délais que par le passé grâce à la « simplification en cours dans la fonction publique et l’Etat ». On a envie d’y croire. Mme Schwarz s’inquiète de voir arriver un jour sur le marché de l’énergie ce qui s’est passé sur le marché des télécoms, une vraie dérèglementation et une chute … des prix.

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GD : Thibaut de Jaegher (Enerpresse-Infopro), Michel Derdevet (ERDF), Anne Houtman (DG Energie UE), Mélanie Persem (Office franco-allemand pour les ENR), Marc Boudier (Pdt AFIEG) ont débattu ensemble des nouveaux benchmarks et stratégies énergétiques européennes (ph CJ MPE-Média)

Filiale de Total qui a démarré dans le photovoltaïque aux Etats-Unis et s’est ensuite développé à l’échelle globale, Sunpower compte à présent 6 000 personnes, pèse 2,3 Mrds€ CA, voit sa production annuelle d’énergie augmenter de façon exponentielle en avançant sur des schémas nouveaux de commercialisation d’un pays à l’autre. Ainsi, Sunpower est-elle propriétaire d’une ferme solaire au Chili, qui vend directement aux électriciens locaux. Selon Arnaud Chaperon, directeur de la prospective et des relations institutionnelles chez Total, le solaire représentera 8% de l’offre d’ici trente ans.

 

Le prix de l’électricité va baisser, les coûts, pas forcément

« Le prix de l’électricité va baisser. La question sera celle des coûts d’externalité et d’intégration dans les réseaux, le passage en « 2.0 », l’effacement de la demande, l’éolien qui fonctionne bien avec le photovoltaïque et aussi les batteries », explique M. Chaperon, qui note près de cinq ans d’avance sur les prévisions du groupe Total.

« Il y a une vraie redistribution du modèle d’affaires avec des systèmes qui s’intermédient au milieu de la chaîne. Ca va plus vite au Chili qu’en France, mais c’est lié à la nature des systèmes », ajoute M. Chaperon.

 

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(Source RTE)

Comme toute tentative de décryptage, cette approche croisée par témoignages interposés de la nouvelle donne énergétique en gestation donne le tournis et laisse entrevoir de profondes différences de culture, entre ceux qui s’en tiennent strictement à leurs rôles ou à des objectifs assignés par la puissance publique, fiscale, et les entrepreneurs privés comme Arnaud Legrand, Ceo de la jeune start up Energiency, qui développe une version logicielle cloud des méthodes plus anciennes d’optimisation de la ressource énergétique et d’efficacité énergétique.

 

Améliorer le niveau des offres

Chez RTE (Réseau de transport d’électricité), on s’attache avant tout à améliorer le niveau des offres tant publiques que privées en s’adaptant à la nouvelle donne de marché, tout en tenant compte des nouvelles connexions avec les pays d’Europe de l’Ouest et de l’Est. Pour RTE, priorité au déploiement des smart grids, à une autre approche de marché sur les réseaux européens.

Le financement de la transition énergétique et des ENR reste la pierre d’achoppement, le vrai sujet : « cela représente déjà de 10 à 30 milliards d’euros supplémentaires par an. Plus de 300 Mrds€ pour le développement mondial des seules énergies renouvelables », explique Alexis Gazzo, associé chez Ernst & Young (EY). Si la refonte des politiques de soutien aux ENR est en cours dans plusieurs pays européens, ce mécanisme a en fait tendance à freiner l’investissement : « le financement public se répartir entre beaucoup d’outils comme les investissements d’avenir de l’ADEME ( 1 Mrd€ financés depuis 2010) ; BPI France qui a déjà investi 3,2Mrds€ depuis 2011 pour financer la transition énergétique ; des fonds régionaux enfin », poursuit M. Gazzo.

 

Nouveaux acteurs financiers

« Dans le top 10 des investisseurs, on trouve 4 étrangers. On voit apparaître de nouveaux acteurs, des fonds spécialisés comme Eurofideme 3 (Mirova) lancé par Natixis, ou Demeter 4 infra, ou encore des obligations vertes comme celle d’AFD, Engie, Paprec, etc. » AXA a réorienté ses investissements dans le charbon vers des activités plus vertes, précise M. Gazzo.

L’argent ne manque pas, ce seraient plutôt les projets « bankables » qui manquent encore un peu, tant pour les investisseurs privés friands de ce type de placements que pour les fonds étatiques dédiés.

Reste à intégrer aussi les nouveaux usages (e-mobilité, par exemple) et à accroître la « prédictibilité » de l’offre, relève Christine Le Bihan-Graf, avocate associée d’un cabinet parisien pour qui la digitalisation de ces process impose encore quelques règles : « l’uberisation de la vente d’énergie n’est pas un danger pour les données en amont et en aval du compteur. La donnée personnelle en amont doit être protégée car elle concerne les personnes. La donnée aval appartient au client du gestionnaire de réseau (…). Concernant la donnée aval compteur, il y a un risque plus important d’appropriation de la donnée avec des visées marketing ».

 

Christophe Journet

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