PARIS (MPE-Média) – « Choisir maintenant, agir pour le climat », tel était le sous titre de la conférence de presse de l’Agence de la transition énergétique (Ademe) intitulée « Transitions 2050 » présentant quatre scénarios allant vers la neutralité carbone. Détails.

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David Marchal, Valérie Quiniou, Arnaud Leroy présentant les scénarios de sortie du carbone travaillés par près d’une centaine de personnes DE L'ADEME (Ph MPE-Média)

Parmi la large gamme de sujets abordés par l’Ademe et son Président Arnaud Leroy en présentiel et en distanciel, les scénarios « climat » et leur contexte incluant l’objectif de neutralité carbone prenaient une belle part de la conférence de presse de ce 30 novembre. « Ce n’est pas qu’une question d’énergies. Le bouclage macro-économique qui sera présenté en mars prochain à Angers à l’occasion des 30 ans de l’ADEME est important, aussi. Chaque scénario est tenu par une cohérence interne. Tout est lié. On parle aussi beaucoup de sobriété. Nous avons aussi insisté sur l’importance des sujets matières et de l’économie circulaire », ouvre Arnaud Leroy.

 

Autre aspect, le reste du monde, au-delà de « l’exercice national », n’est pas inactif, notamment l’Allemagne. L’Ademe montre comment on peut atteindre la neutralité carbone de plusieurs façons, n’a pas de préférence entre ces scénarios, pense qu’il faut « mettre en avant le techno-discernement », et expose la méthode choisie pour réaliser cette étude « Transitions 2050 », qui montre qu’un scénario « tendanciel » échoue à atteindre la neutralité carbone.

 

Pour ce faire, l’agence de la transition a établi quatre scénarios, deux faisant appel à la notion de sobriété, deux à des choix technologiques, chacun ayant un impact graduel propre :

  • - Génération frugale, le premier, passe par une « frugalité contrainte », des choix de nourriture bio (3 fois moins de viande), une politique de rénovation massive (80% des locaux) et de nouvelles affectations de locaux professionnels, pour optimiser l’emploi du bâti. Ce scénario présente aussi une division par deux de la consommation d’énergie, un plan pour les forêts.
  • - Coopérations territoriales, le 2ème scénario, évoque une « mobilité maîtrisée » grâce à plus de coopération entre les territoires, une réindustrialisation ciblée, une fiscalité locale environnementale, plus d’éco-partage domestique, une « gouvernance ouverte » pour des « modes de vie soutenables ». Les transports de marchandises diminuent de 35% en tonne/km, l’industrie est accompagnée par des politiques publiques, 80% des matières, métaux, autres matières en fin de vie sont recyclées, impliquant une réduction par deux du besoin en énergie, avec « une panoplie complète d’usage directs ou indirects de l’hydrogène.
  • - Technologies vertes est le 3ème scénario étudié par l’Ademe : Hydrogène, en grande partie importée, biomasse, usage de la forêt pour en produire, biocarburants, intrants de synthèse, « consumérisme vert », programmes de « déconstruction-reconstruction » développés pour améliorer l’efficacité énergétique, mobilité en hausse de 13% par rapport à 2015. Ce scénario parle de « régulation minimale » mais choisit l’électrification pour les transports, l’aide à l’acquisition de voitures électriques, la relocalisation de la production de batteries dans les territoires. Les datas centers fonctionnant dix fois plus qu’en 2020, la fourniture d’énergie doit « suivre » aussi ainsi que le captage et stockage du CO2.

 

  • - Pari réparateur, le 4ème scénario dit de « consommation de masse » dresse un bilan critique des « technologies incertaines » dans une économie mondialisée, compte sur l’intelligence artificielle, industrialise la rénovation des bâtiments, compte sur la domotique pour réduire l’impact de l’habitat. La mobilité augmente de 28%, le e-commerce continue à se développer. L’industrie est décarbonnée et le recyclage développé. Plusieurs leviers de décarbonation sont utilisés, plusieurs pays développant les « gaz verts » et les technologies de captage de CO2 dans l’air sont poussées en 2050 à près de un million de tonnes d’équivalent CO2.

 

Quels scénarios permettent d’atteindre la neutralité carbone ?

Les enseignements clés de ces quatre scénarios comparés entre eux déterminent des points communs, des alternatives, le niveau de risque de chaque parcours : Les scénarios 1 et 4 semblent plus risqués, le premier étant jugé « clivant socialement quant à sa désirabilité » et le quatrième « portant un risque fort de faisabilité technologique. Les émissions cumulées des deux autres scénarios permettent seules d’atteindre la neutralité carbone, à raison de plusieurs millions de tonnes de CO2 émises en plus dans le 4ème scénario que dans les 2ème et 3ème. L’agence note que la réduction de la demande en énergie finale est « le facteur clé de l’atteinte de la neutralité carbone » : par la sobriété on entend le choix de réduire ses besoins, la nécessité d’importants changements de modes de vie, l’économie des ressources en énergie, de l’eau pour l’irrigation, aussi.

Les baisses de consommation d’énergie dans l’industrie comme dans le bâtiment supposent des choix incontournables.

 

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Représentation stylisée de l’étude Transitions 2050 (source Ademe)

 

Pour préserver le vivant, l’agence explique que trois leviers doivent être mis en action :

  • - Stockage du carbone
  • - Production de biomasse
  • - Réduction des gaz à effets de serre

 

Le changement de pratiques agricoles, la production abondante de biomasse et l’adaptation des forêts deviennent donc « absolument prioritaires ». Les puits biologiques de carbone sont suffisants dans les 1er et 2ème scénarios, mais doivent passer par des technologies de captage pour le 4ème scénario.

 

70 à 88% d’énergies renouvelables

La part des énergies renouvelables dans le mix énergétique doit s’élever à 70 ou 88%, avec une « quasi disparition des énergies fossiles », le vecteur gaz conservant « un talon de consommation d-très décarbonné » (biogaz, gaz produit avec de l’électricité). L’offre en biocarburants liquides devrait monter à 100 TWh.

 

Les scénarios 1 et 2 font appel à la sobriété, les 3 et 4 davantage à des avancées technologiques et à l’extraction et au stockage géologique du CO2 de l’air ambiant. « La sobriété heurte le mode de pensée dominant du consumérisme. Ce qui semble une privation pour une génération peut apparaître comme une évidence pour une autre » note l’Ademe, mais « permet de sécuriser l’atteinte de la neutralité carbone » et ne peut être disjoint du thème des inégalités.

 

Enfin, le régime alimentaire durable doit devenir un vrai sujet à l’horizon 2050, avec le doublement prévu des besoins alimentaires d’ici là, ce qui pose la question de « l’adaptation de l’agriculture au changement climatique ». Et la baisse de la « suralimentation », la réduction du gaspillage alimentaire.

 

Mon tout implique donc à la fois une évolution sociétale et industrielle forte, avec des changements de modèles d’affaires, de nouveaux procédés, des défis énergétiques et le développement de l’économie circulaire bien au-delà de ce qu’elle est à ce jour. Pour développer ces thèmes, l’Ademe présentera fin janvier ses études sur le mix électrique et métaux de la transition énergétique et fin mars ses conclusions sur les modes de vie, les impacts macro-économiques, l’empreinte matières et gaz à effets de serre, soit comment adapter mon tout à ces anticipations.

 

« Les impacts du télétravail, la question des feux de forêts, celle de la pollution de l’air doivent aussi être abordés par ces prévisions, ce n’est pas simple, c’est complexe, notamment concernant l’attente en matière de consommation », conclut le Président de l’Ademe qui ajoute en évoquant l’éolien : « Vous voyez bien qu’on ne met pas de gros mots là-dedans. Il s’agit bien de débattre, de ne pas se mentir, de savoir qu’on n’atteindra pas cet objectif de neutralité carbone sans en passer par là ».

 

Peu après la COP26, dont les cadres de l’Ademe pensent qu’elle est « entrée dans le dur, la vraie question étant la transparence, les méthodes de calcul, la nécessaire gouvernance à mettre en place suite aux accords de Paris ». Mais qu’on en est encore à plus de 2° d’augmentation du climat en 2050 à ce stade.

 

Christophe Journet

Rédacteur en chef de MPE-Média

VOIR AUSSI VIA www.transitions2050.ademe.fr

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